
La France mobilise des A400M pour évacuer ses ressortissants d’Israël vers Chypre, face à la montée des tensions sécuritaires au Proche-Orient.
Le gouvernement français a annoncé la mobilisation d’avions de transport militaire A400M afin d’évacuer ses ressortissants d’Israël vers Chypre. Cette décision a été validée lors d’un Conseil de défense et de sécurité nationale tenu à l’Élysée, en réponse à l’escalade régionale marquée par des frappes israéliennes contre des infrastructures iraniennes et la menace de ripostes ciblant les zones urbaines.
La France compte près de 250 000 ressortissants en Israël, dont 100 000 inscrits au registre consulaire. L’activation d’un tel dispositif logistique traduit la gravité de la situation. Les premières opérations de rapatriement ont débuté fin juin, sous coordination conjointe du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et de l’Armée de l’Air et de l’Espace.
Les avions décollent de l’aéroport Ben Gurion de Tel-Aviv et atterrissent à Larnaca, en République de Chypre, qui joue un rôle central dans ce dispositif d’évacuation.
Un afflux massif de demandes d’assistance
La détérioration rapide du climat sécuritaire a entraîné un afflux d’appels au Centre de crise du Quai d’Orsay. En l’espace d’une semaine, plus de 4 500 demandes ont été enregistrées, provenant aussi bien de Français résidents permanents que de touristes.
La communauté française d’Israël est l’une des plus importantes à l’étranger. Beaucoup sont établis à Tel-Aviv, Jérusalem et Haïfa, mais un nombre non négligeable vit dans les zones frontalières, plus exposées à d’éventuelles frappes. Le Quai d’Orsay a donc jugé nécessaire de prioriser les personnes les plus vulnérables : familles avec enfants, personnes âgées, ressortissants en situation médicale fragile.
Ce contexte rappelle la gestion de crises précédentes, comme l’opération Baliste au Liban en 2006, où plusieurs milliers de personnes avaient été évacuées en urgence par la Marine nationale et des moyens aériens.
Les capacités de l’A400M Atlas
L’Airbus A400M Atlas est au cœur de cette opération. Entré en service dans l’Armée de l’Air et de l’Espace en 2013, cet appareil est capable de combiner transport stratégique et tactique.
- Capacité d’emport : environ 37 tonnes de matériel ou jusqu’à 116 passagers en configuration de transport de troupes. Dans le cadre des évacuations, la configuration retenue permet d’accueillir environ 100 personnes par vol, avec leurs bagages essentiels.
- Autonomie : un rayon d’action de 3 300 km avec 20 tonnes de charge utile, largement suffisant pour relier Tel-Aviv à Larnaca (environ 350 km).
- Polyvalence : l’appareil peut également être utilisé pour des missions médicalisées. Un A400M peut être configuré en version MEDEVAC et accueillir jusqu’à 66 brancards et du personnel médical.
Ces caractéristiques en font un outil adapté aux évacuations en environnement instable. La cabine pressurisée, la rampe arrière et la capacité à opérer depuis des pistes semi-préparées renforcent sa souplesse d’emploi.
Les premiers vols et les chiffres de l’opération
Le premier vol militaire a permis d’évacuer 102 ressortissants français vers Chypre. À leur arrivée, les passagers ont été pris en charge par l’ambassade de France et hébergés temporairement avant un retour organisé vers Paris.
À cette mission s’ajoutent :
- un vol affrété par Royal Jordanian depuis Amman, transportant 150 Français ;
- un vol supplémentaire organisé par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, destiné à 150 personnes vulnérables ;
- une montée en puissance progressive des rotations aériennes, en fonction de l’évolution de la menace et de la demande.
À terme, plusieurs centaines de personnes devraient bénéficier du dispositif. La coordination entre moyens militaires et civils a été conçue pour maximiser la réactivité, tout en répartissant les flux selon les zones de rassemblement.

Le rôle stratégique de Chypre
Chypre occupe une place clé dans cette opération. L’île a activé le plan ESTIA, conçu pour accueillir temporairement les ressortissants étrangers en transit lors de crises régionales.
L’aéroport international de Larnaca dispose de capacités logistiques suffisantes pour gérer un flux continu de passagers. Les infrastructures locales permettent également l’installation de structures d’accueil médical et psychologique.
Ce choix d’un hub intermédiaire offre plusieurs avantages :
- réduire le temps de vol depuis Israël,
- éviter une exposition prolongée des appareils français dans un espace aérien à risque,
- disposer d’une base arrière stable avant un retour vers la France.
Ce schéma a déjà été appliqué par d’autres pays européens lors de crises au Proche-Orient, confirmant la pertinence stratégique de l’île comme zone de transit.
Une coordination inter-ministérielle et militaire
L’opération repose sur une coopération étroite entre plusieurs entités :
- l’Armée de l’Air et de l’Espace, responsable de la conduite des vols ;
- le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, qui identifie et regroupe les personnes à évacuer ;
- le Centre de crise et de soutien, qui assure la communication avec les familles ;
- les ambassades à Tel-Aviv et Nicosie, qui facilitent la prise en charge locale.
Ce maillage garantit que l’opération reste fluide malgré l’urgence. Les évacués bénéficient d’un accompagnement médical et psychologique, avec la présence de médecins militaires à bord de certains vols.
Les enjeux humanitaires et politiques
L’envoi d’A400M pour évacuer des ressortissants répond d’abord à une obligation de protection des citoyens français. Mais il comporte aussi une dimension politique et diplomatique.
- Humanitaire : protéger les plus fragiles et garantir la sécurité des familles françaises vivant dans une zone de guerre.
- Politique : montrer la capacité de l’État à agir rapidement, en mobilisant ses moyens militaires pour une mission à caractère civil.
- Diplomatique : préserver les relations bilatérales avec Israël et maintenir la crédibilité de la France auprès de ses partenaires régionaux.
Ces opérations sont également observées par d’autres pays européens, certains cherchant à coordonner leurs propres évacuations.
Un modèle pour de futures crises
Au-delà de l’urgence actuelle, cette opération pose la question de la préparation aux crises à venir. Dans un contexte marqué par la multiplication des tensions régionales, la France pourrait être amenée à reproduire ce schéma dans d’autres zones sensibles.
L’expérience acquise confirme la pertinence d’un modèle combinant :
- un avion de transport militaire polyvalent comme l’A400M,
- un hub intermédiaire sûr et bien équipé,
- une coordination civile et militaire intégrée.
Ce type de réponse pourrait devenir un référentiel opérationnel pour les futures évacuations de ressortissants en zone de conflit.
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