
Analyse détaillée des capteurs infrarouges et électro-optiques intégrés aux avions de chasse américains, russes, français et chinois.
Les capteurs infrarouges et électro-optiques sont devenus des éléments clés dans la supériorité technologique des avions de chasse modernes. Ces systèmes permettent aux pilotes de détecter, identifier et suivre des cibles aériennes ou terrestres dans des conditions où les radars sont limités ou inefficaces. Ils offrent une capacité de détection passive, difficilement repérable, et assurent une veille optique constante dans les domaines infrarouge, visible et parfois ultraviolet. L’intégration de ces capteurs aux avions de combat varie selon les doctrines militaires et les capacités industrielles des nations.
Les États-Unis, la Russie, la France et la Chine ont développé des capteurs spécifiques adaptés à leurs plateformes. Cet article examine en détail les équipements intégrés aux principaux chasseurs de ces quatre puissances, en évaluant leurs performances, usages opérationnels et logiques d’intégration. Les systèmes sont analysés selon leurs plages spectrales, résolutions, capacités de poursuite et d’engagement, et interfaces avec les autres capteurs embarqués. L’objectif est de comprendre comment chaque pays utilise ces technologies pour améliorer la détection passive et la conscience situationnelle de ses pilotes, et dans quelle mesure ces capteurs influencent les tactiques de combat aérien actuelles.

Les capteurs infrarouges et électro-optiques des avions de chasse américains
Systèmes intégrés aux F-22, F-35 et F-15EX
Les avions de chasse américains intègrent plusieurs familles de capteurs électro-optiques, dont les plus avancées sont embarquées sur les Lockheed Martin F-22 Raptor et F-35 Lightning II. Le F-35 est doté du système AN/AAQ-37 Distributed Aperture System (DAS) développé par Northrop Grumman. Il comprend six caméras infrarouges à ondes moyennes (MWIR) couvrant l’ensemble de l’environnement de l’avion (360°). Il offre la détection de missiles, le suivi passif de cibles, l’aide à l’atterrissage de nuit et la fusion de données avec le casque du pilote. Le système est capable de détecter un lancement de missile balistique à plus de 1 000 kilomètres.
Le F-35 embarque également le capteur AN/AAQ-40 EOTS (Electro-Optical Targeting System), intégré sous le nez de l’appareil. Ce système combine un désignateur laser, une caméra infrarouge à haute résolution et un télémètre, permettant la désignation de cibles à grande distance. Il fonctionne sur les bandes MWIR avec une portée opérationnelle d’environ 50 kilomètres pour des cibles aériennes non furtives.
Le F-22 ne possède pas de capteur optique frontal intégré de série, ce qui constitue une lacune face au F-35. Le nouveau F-15EX, quant à lui, est équipé de Legion Pod, un capteur externe basé sur le IRST21, détecteur infrarouge à balayage passif. Ce pod permet la détection d’aéronefs furtifs via leur signature thermique.
Tous ces capteurs sont interfacés avec des systèmes de fusion de données embarqués pour alimenter la conscience situationnelle. Leur usage repose sur la complémentarité avec les radars AESA, mais aussi sur la capacité à opérer en silence électronique.
Les capteurs infrarouges et électro-optiques des avions de chasse russes
Technologies embarquées sur Su-30, Su-35 et Su-57
Les avions de chasse russes ont historiquement intégré très tôt des systèmes IRST (Infrared Search and Track), notamment avec la série des MiG-29 et Su-27. Le Su-35S et le Su-30SM sont dotés de capteurs OLS-35 et OLS-30, placés à l’avant gauche du cockpit. Ces capteurs combinent une caméra infrarouge de poursuite, un télémètre laser et un désignateur de cible. Le OLS-35, par exemple, permet la détection frontale d’une cible non furtive à environ 90 kilomètres, et latérale à 35 kilomètres.
Le Su-57, avion de chasse de cinquième génération, intègre le système 101KS “Atoll” développé par l’Institut UOMZ. Ce système comprend plusieurs sous-ensembles :
- 101KS-V : capteur IRST frontal à longue portée.
- 101KS-O : capteur infrarouge de détection de missiles.
- 101KS-U : système UV de détection d’éblouissement laser.
- 101KS-N : viseur de désignation pour le ciblage de précision.
Le système 101KS travaille sur les bandes MWIR et LWIR, avec des performances proches de celles du DAS américain. Il permet une détection simultanée multi-cible, avec un traitement via le système de fusion IMA BK intégrée du Su-57.
Les capteurs électro-optiques russes ont une résolution inférieure à ceux des systèmes américains, mais ils bénéficient d’une sensibilité élevée et d’une interopérabilité étroite avec les radars N036 Belka. En revanche, le poids des systèmes russes et leur intégration souvent visible les rendent plus vulnérables au repérage.

Les capteurs infrarouges et électro-optiques des avions de chasse français
Équipements du Rafale et perspectives pour le SCAF
Le Dassault Rafale est équipé d’un système électro-optique intégré développé par Thales : le Front Sector Optronics (FSO). Ce dispositif est installé entre le cockpit et le radar, dans l’axe du nez. Il se compose de deux voies principales :
- Voie TV haute résolution pour identification diurne jusqu’à 45 kilomètres.
- Capteur infrarouge IR longue portée (3–5 µm) pour la détection de cibles chaudes jusqu’à 100 kilomètres dans des conditions idéales.
Le FSO inclut également un télémètre laser de précision utilisé pour les frappes guidées. Contrairement aux systèmes américains, le FSO n’est pas totalement intégré à un DAS, mais il s’interface via la fusion de données avec le radar RBE2 AESA. Sa performance est limitée en environnement fortement nuageux ou en conditions nocturnes sans dégagement thermique élevé.
Dans les années à venir, le Système de Combat Aérien du Futur (SCAF) développé avec l’Allemagne et l’Espagne prévoit une refonte complète des capteurs. Il devrait intégrer un système multispectral de détection passive, avec une couverture sphérique, associant infrarouge, ultraviolet et électro-optique. L’objectif est d’assurer une détection à 360°, comparable au DAS du F-35, mais avec une meilleure intégration réseau et traitement via intelligence artificielle.
Les capteurs électro-optiques français restent performants, mais moins automatisés et distribués que leurs équivalents américains. Toutefois, ils offrent une très bonne fiabilité et un entretien simplifié.
Les capteurs infrarouges et électro-optiques des avions de chasse chinois
Évolutions sur J-10C, J-20 et FC-31
La Chine a considérablement développé ses capacités optiques au cours des dix dernières années. Le Chengdu J-10C est équipé d’un capteur IRST situé devant la verrière, similaire en apparence au système russe OLS-35. Ce capteur offre une portée frontale estimée à 50 kilomètres pour une cible à forte signature thermique.
Le J-20, chasseur de cinquième génération, embarque le système EOTS-89. Placé sous le nez, il s’agit d’un capteur optique infrarouge multifonction permettant la détection passive et la désignation laser. Ce système serait inspiré du DAS et EOTS du F-35, mais son efficacité réelle reste difficile à vérifier. Les analystes estiment une couverture partielle à 270°, avec une résolution inférieure à celle des systèmes occidentaux.
Le FC-31, destiné à l’export et aux porte-avions chinois, intègre également un capteur IRST frontal, couplé à un viseur monté sur casque.
L’industrie chinoise mise fortement sur l’intégration numérique et la miniaturisation. Les futurs avions pourraient intégrer un réseau de capteurs répartis sur la cellule, à l’image du DAS, avec traitement via intelligence artificielle.
Toutefois, malgré les progrès, les capteurs chinois souffrent d’un manque de transparence sur leurs performances réelles, et restent dépendants des avancées occidentales en matière de traitement d’image thermique et de fusion capteur.
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