Avions De Combat : La Belgique Snobe L’UE Et Se Tourne Vers Les Etats-Unis

La Belgique a-t-elle porté un coup mortel à l’Europe de la défense ? En annonçant jeudi sa décision de remplacer, à partir de 2023, ses 54 vieux chasseurs bombardiers F-16, construits par l’américain Lockheed Martin, par 34 F-35 flambant neufs, des avions dits de la «cinquième génération» du même constructeur, au détriment du Rafale français et de l’Eurofighter Typhoon (Airbus, BAE et Leonardo, ex-Finmeccanica), elle a provoqué une réaction cinglante d’Emmanuel Macron. Le président français a «regretté le choix fait» qui, «stratégiquement, va a contrario des intérêts européens».

Pourquoi autant d’émotion autour de ce contrat, certes important à l’échelle belge – 3,6 milliards d’euros à l’achat, mais 15 milliards d’euros sur les quarante ans de vie des appareils, sans doute beaucoup plus vu les déboires de l’appareil américain – mais insignifiant au regard des enjeux d’une défense européenne ? Après tout, le Royaume-Uni, le Danemark, les Pays-Bas et l’Italie ont déjà commandé des F-35 sans qu’on en fasse grand cas. C’est que ces pays se sont associés dès les années 2000 à ce programme dont l’un des objectifs était de siphonner une partie des efforts de recherche et de développement militaire des Etats européens en les embarquant, sous contrôle total des Américains, à bord de cette aventure. La Belgique, alors dirigée par le libéral flamand Guy Verhofstadt, qui venait de s’opposer à la guerre en Irak, a refusé de tomber dans le piège. Le choix belge est donc hautement symbolique puisque Bruxelles était libre d’en faire un autre, les retombées industrielles du F-35 étant particulièrement limitées.

Au-delà des critiques sur un appareil qui n’a guère tenu ses promesses après dix-sept ans de développement, le F-35 est une option qui se justifie uniquement si l’appareil est destiné à agir dans le cadre américain ou otanien : isolé, l’avion a des capacités d’action infiniment moindres que celles de ses concurrents ou même du F-16, Vol en avion de chasse car il dépend de l’accès aux informations que les Américains voudront bien lui donner. Autrement dit, la Belgique a fait le choix de la dépendance aux Etats-Unis à l’heure où Donald Trump se révèle un allié peu fiable.

Mais les indépendantistes de l’Alliance néo-flamande (N-VA), qui détiennent les clés du pouvoir comme de l’armée, ne voulaient en aucun cas d’un avion français et avaient dès le départ opté pour le F-35. De ce point de vue, la procédure d’appel d’offres a été une farce : «A toutes les questions, la seule réponse possible était F-35», Vol en avion de chasse résume un diplomate français. C’est pour cela que Boeing, Dassault et le Gripen suédois s’en sont retirés. La France a fait le choix, en septembre 2017, d’offrir un «partenariat stratégique» à la Belgique, avec de fortes retombées industrielles et, surtout, un accès au nuage d’informations recueillies par les Rafales français, ce qui impliquait une forte intégration à l’armée hexagonale…

Le partenariat proposé par la France impliquait également l’intégration de la Belgique au programme franco-allemand de système de combat aérien du futur, le Scaf (avion et drone). Car les grandes manœuvres dans l’industrie de l’aviation de combat de demain ont commencé et les Européens ont d’excellentes cartes à jouer, surtout dans le nouveau monde que dessine Donald Trump.

Les Belges ont donc offert une belle victoire à Trump en s’interdisant de participer pour longtemps à l’Europe de la défense. Mais, au fond, est-ce une mauvaise chose ? En matière d’armement, il est prouvé, comme l’a montré l’A400M, qu’il vaut mieux limiter les pays participants. La Belgique vient juste de confirmer que la défense européenne sera à la carte. Et qu’elle ne sera pas dans cette carte.

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