Moscou détaille un plan de frappes sur le Japon

bombardier TU-160

Des analystes russes publient un scénario d’attaques contre les défenses japonaises, en réponse aux missiles Type 12 et MRC Typhon.

Une simulation offensive révélatrice d’un durcissement stratégique

Des analystes militaires russes ont publié une étude tactique envisageant une campagne de frappes de missiles contre le Japon. Ce scénario, relayé par le média Voennaya Khronika, réputé proche du pouvoir à Moscou, détaille méthodiquement les étapes d’une attaque visant à neutraliser l’architecture de défense japonaise, considérée comme une menace directe pour l’Extrême-Orient russe.

Bien que présenté comme une simulation théorique, ce document montre un changement de ton dans la doctrine publique russe, en intégrant explicitement le Japon comme cible potentielle dans le cadre d’un affrontement indirect avec les États-Unis. La précision du plan, l’estimation chiffrée des frappes et les cibles nommément identifiées témoignent d’une volonté assumée de dissuasion active.

Une réponse annoncée aux systèmes missiles déployés au Japon

La justification avancée par les analystes russes repose sur le déploiement sur le sol japonais de missiles sol-sol à longue portée, en particulier les systèmes Type 12 améliorés, conçus localement, et les MRC Typhon américains, dotés de missiles SM-6 et Tomahawk. Ces derniers possèdent une portée supérieure à 2 000 kilomètres, ce qui permettrait de frapper les installations russes dans l’Extrême-Orient, y compris Vladivostok, la base aérienne de Knevichi ou encore le port de Petropavlovsk-Kamtchatski.

Le gouvernement japonais justifie ces acquisitions par le renforcement de ses capacités de contre-frappe face à la menace nord-coréenne, mais Moscou y voit une extension de la projection américaine en Asie. Dans cette optique, les sites japonais accueillant ces systèmes sont désormais considérés comme des cibles prioritaires en cas d’escalade.

Une campagne de frappes articulée en trois phases distinctes

L’analyse détaille un plan en trois phases destiné à désorganiser successivement la défense aérienne, la capacité de projection navale, et la base industrielle militaire du Japon.

Phase 1 : neutralisation du réseau anti-aérien

La première vague viserait les principaux nœuds de défense aérienne, dont les batteries Patriot PAC-3 stationnées à Hakodate, Iruma et Gifu. Ces sites nécessiteraient, selon les calculs russes, entre 25 et 45 missiles de croisière Kh-101 ou Iskander par objectif, ou 10 à 12 missiles hypersoniques Kinzhal pour éviter les interceptions.

En parallèle, le plan propose la destruction des radars d’alerte précoce de type J/FPS-3UG (à Tobetsu et Kyogamisaki) et J/FPS-4 (à Tokao). Chacun de ces postes serait ciblé par environ sept missiles Kh-101, dans l’objectif de priver le Japon de sa capacité de détection avancée.

Cette phase chercherait à désorganiser la chaîne de commandement et la coordination des frappes défensives en saturant les systèmes antimissiles.

Phase 2 : neutralisation des capacités de projection navale

Une fois la couverture radar affaiblie, les frappes viseraient les bases navales de Maizuru et Ominato, essentielles au déploiement maritime de la Force maritime d’autodéfense japonaise. L’analyse chiffre à 20 à 25 missiles Kalibr par site la charge nécessaire pour les rendre inopérants.

Ces bases servent notamment au soutien logistique des destroyers de classe Maya et Atago, intégrés au système Aegis. Les mettre hors service réduirait de manière significative la mobilité des forces japonaises en mer du Japon et dans le Pacifique nord.

Phase 3 : paralysie de l’appareil industriel de défense

La dernière phase ciblerait les chantiers navals de Mitsubishi Heavy Industries, situés à Nagasaki, Kobe, Yokohama et Shimonoseki. Ces installations assurent l’entretien de bâtiments japonais et américains, dont des sous-marins et navires d’escorte basés au Japon dans le cadre de l’accord bilatéral de sécurité.

Détruire ces capacités de production affecterait le soutien logistique de la 7e Flotte américaine et fragiliserait l’ensemble de l’alliance nippo-américaine dans la région.

L’ensemble de l’opération requerrait entre 200 et 250 missiles de croisière Kh-101, avec la possibilité de substituer une partie par des missiles hypersoniques Kinzhal, plus coûteux mais capables de franchir les défenses aériennes avec un taux de réussite élevé.

bombardier TU-160

Une stratégie d’usure inspirée de l’Ukraine

Les analystes russes indiquent que l’expérience accumulée en Ukraine depuis 2022 a permis d’ajuster la planification des frappes complexes, notamment en matière de saturation des défenses, de détection radar et de brouillage électronique.

Les frappes répétées contre les infrastructures ukrainiennes ont affiné les méthodes de tir en salve, la gestion du stock de missiles à longue portée, ainsi que la coordination entre moyens aériens, navals et terrestres.

Ce retour d’expérience est désormais extrapolé à des scénarios de guerre conventionnelle en Asie, contre des États dotés d’une défense intégrée, comme le Japon.

Un avertissement politique à peine voilé

Si aucun calendrier d’exécution n’est évoqué dans cette publication, la volonté de rendre public un tel scénario marque une étape supplémentaire dans la stratégie d’intimidation russe. Le Japon, pourtant non membre de l’OTAN, est désigné comme une extension militaire de Washington en Asie-Pacifique, et donc comme cible potentielle en cas de conflit indirect entre puissances.

Cette rhétorique n’est pas nouvelle, mais la granularité de l’analyse et la précision géographique des cibles en font un outil de pression à usage externe autant qu’interne. En Russie, ce type de contenu alimente un discours de légitimation du réarmement et de la confrontation avec les puissances dites hostiles.

Une logique de contre-frappe asymétrique

Ce scénario russe révèle aussi les limites d’une posture strictement défensive du Japon. En cherchant à se doter de moyens de dissuasion conventionnels, comme les MRC Typhon ou les missiles Type 12 étendus, Tokyo prend le risque d’être requalifié en acteur actif d’une architecture offensive perçue par Moscou.

Cela soulève une question stratégique centrale : peut-on renforcer sa capacité de riposte sans provoquer une escalade anticipée ? La Russie répond par la menace : tout système pouvant frapper son territoire sera traité comme une cible immédiate, même hors conflit ouvert.

Avion-Chasse.fr est un site d’information indépendant.

A propos de admin 1831 Articles
Avion-Chasse.fr est un site d'information indépendant dont l'équipe éditoriale est composée de journalistes aéronautiques et de pilotes professionnels.