La Suède modernisera la flotte aérienne soviétique de l’Ukraine

La Suède modernisera la flotte aérienne soviétique de l'Ukraine

L’Ukraine et la Suède envisagent de moderniser la flotte aérienne soviétique de Kyiv avec l’appui technique de SAAB, incluant radars et guerre électronique.

L’Ukraine engage une coopération technique avec la Suède, via le groupe SAAB, pour moderniser sa flotte aérienne d’origine soviétique. Ce partenariat repose sur l’intégration de technologies suédoises de pointe – notamment des radars, des systèmes de guerre électronique et des dispositifs de protection embarquée. L’objectif : renforcer la résilience opérationnelle de l’armée de l’air ukrainienne face aux menaces modernes, tout en valorisant le retour d’expérience du combat pour les industriels suédois. Des discussions sont également en cours sur la livraison éventuelle d’aéronefs suédois, bien qu’aucun contrat ne soit encore signé. Cette coopération s’inscrit dans une logique de long terme pour améliorer la défense ukrainienne sans dépendre exclusivement de l’OTAN ou des États-Unis.

Une collaboration technico-militaire au cœur des enjeux de modernisation

L’entretien entre le ministère ukrainien de la Défense et SAAB, acteur central de l’aéronautique suédoise, marque une accélération stratégique dans la volonté de Kyiv de refondre ses capacités aériennes. La flotte actuelle de l’Ukraine, largement composée de MiG-29, Su-27 et Su-25 d’origine soviétique, est confrontée à une usure rapide liée à l’intensité des opérations depuis 2022. Ces appareils, conçus entre les années 1970 et 1980, manquent de compatibilité avec les normes occidentales actuelles, notamment en termes de communication, de navigation et de guerre électronique.

La Suède, par le biais de SAAB, propose un soutien ciblé en avionique de nouvelle génération. Ce type d’équipement inclut notamment des radars à balayage électronique actif (AESA), des modules de liaison de données sécurisées, des systèmes de contre-mesures électroniques (ECM) et des capteurs infrarouges de suivi de cible (IRST). Ces technologies permettraient de prolonger la durée de vie opérationnelle des avions ukrainiens tout en améliorant leur efficacité sur le champ de bataille.

Par exemple, le radar PS-05/A Mk4, utilisé sur le chasseur suédois JAS 39 Gripen, offre une portée de détection pouvant atteindre 160 km contre une cible de type chasseur. Si une version adaptée était intégrée à un Su-27 modernisé, cela permettrait à l’Ukraine d’accroître ses capacités de défense aérienne tout en réduisant les délais de transition vers des avions occidentaux neufs.

La Suède modernisera la flotte aérienne soviétique de l'Ukraine

L’intégration d’avionique suédoise sur les cellules soviétiques

La mise à niveau de vieux appareils impose des contraintes techniques majeures, notamment en termes de compatibilité électronique et d’alimentation électrique. Les systèmes soviétiques étaient conçus pour une architecture totalement différente de celle des équipements occidentaux. Pour réussir cette intégration, SAAB devra reconfigurer ou adapter ses modules à des structures préexistantes, ce qui implique des essais sur bancs de test, des campagnes d’intégration logicielle, ainsi que la formation de techniciens locaux à la maintenance des nouvelles solutions.

Selon des experts aéronautiques, la modernisation d’un appareil comme le Su-25 coûterait entre 5 et 10 millions d’euros par unité, selon la complexité des composants installés. En comparaison, l’acquisition d’un chasseur neuf de type F-16 coûte en moyenne 70 à 80 millions d’euros pièce. Cette option de modernisation apparaît donc comme plus réaliste à court terme, surtout en contexte de guerre prolongée où l’attrition reste élevée.

D’un point de vue tactique, l’ajout de systèmes de guerre électronique modernes permettrait aux appareils ukrainiens de mieux résister aux systèmes de défense russes comme le S-400 Triumf, qui reste une menace majeure pour tout avion évoluant à moins de 250 km de ses radars. Les contre-mesures embarquées (flares, brouilleurs actifs, pods) contribueraient à réduire la vulnérabilité en milieu contesté.

L’intérêt mutuel pour les deux partenaires

Le partenariat envisagé n’est pas à sens unique. SAAB pourrait tirer un retour d’expérience précieux en collaborant avec une armée confrontée à des conditions de guerre symétrique intense. Les ingénieurs suédois auraient accès à des données opérationnelles sur la performance de leurs systèmes en environnement de guerre réelle, chose rare en Europe depuis des décennies.

L’Ukraine, de son côté, bénéficierait de compétences industrielles avancées, difficilement accessibles ailleurs sans accords formels de transfert technologique. Cette coopération pourrait s’étendre à des programmes de co-développement, notamment dans le domaine des drones, où la Suède développe des plateformes tactiques intéressantes comme le Saab Skeldar V-200.

Ce type de coopération ouvre aussi des perspectives en matière de normalisation OTAN. Intégrer de l’équipement suédois pourrait faciliter à terme l’interopérabilité avec les forces aériennes occidentales, ce qui reste une priorité stratégique pour Kyiv. Cela réduirait les coûts de transition une fois que l’armée de l’air basculera vers des plateformes entièrement occidentales.

Vers une possible livraison d’avions suédois ?

L’une des dimensions clés de la discussion concerne la livraison éventuelle de chasseurs suédois à l’Ukraine. Le modèle le plus envisageable serait le JAS 39 Gripen, réputé pour ses faibles coûts d’exploitation (environ 5 500 € de l’heure de vol, contre 25 000 € pour un F-16), sa grande autonomie logistique, et sa capacité à opérer depuis des pistes courtes.

Cependant, plusieurs obstacles politiques persistent. Le gouvernement suédois, bien qu’engagé dans le soutien à l’Ukraine, reste prudent quant à l’exportation directe d’avions de combat. Des autorisations parlementaires et des discussions avec les alliés européens et américains sont nécessaires pour valider une telle décision.

En attendant, des programmes de formation de pilotes ukrainiens sur Gripen ont été envisagés, notamment en Hongrie et en République tchèque, où ces avions sont déjà en service. Cette anticipation traduit une volonté stratégique d’accélérer l’appropriation des standards occidentaux par l’armée ukrainienne.

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Une modernisation pragmatique dans un contexte d’attrition

L’approche choisie par Kyiv s’inscrit dans une logique pragmatique. Plutôt que de dépendre entièrement de livraisons massives d’avions neufs – souvent lentes et politiquement sensibles –, l’Ukraine cherche à valoriser son parc existant. Moderniser 30 à 40 Su-27 et MiG-29 avec avionique suédoise permettrait de maintenir une masse critique de moyens aériens face aux forces russes, tout en augmentant la létalité et la protection des pilotes.

Cette stratégie pourrait servir de modèle pour d’autres États post-soviétiques, confrontés aux mêmes enjeux de transition technologique. La Moldavie, la Géorgie ou même certains pays africains utilisant du matériel soviétique pourraient suivre une logique similaire, créant ainsi un marché potentiel pour SAAB dans le rétrofit d’avions de combat anciens.

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