
Malgré les sanctions occidentales, la Russie maintient son économie de guerre en contournant les restrictions grâce à des réseaux d’approvisionnement alternatifs.
Depuis 2014, la Russie fait face à des sanctions économiques croissantes, intensifiées après l’invasion de l’Ukraine en 2022. Ces mesures visent à limiter l’accès de Moscou à des technologies clés, notamment les équipements industriels et les composants à double usage. Malgré cela, la Russie parvient à maintenir ses capacités de production, notamment dans le secteur militaire, en s’appuyant sur des réseaux d’approvisionnement parallèles, des pays tiers et des stratégies d’évitement sophistiquées. Parallèlement, l’économie russe subit des tensions internes, notamment une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, exacerbée par la mobilisation militaire et l’émigration.
Les sanctions sur les biens à double usage et leur contournement
Les sanctions occidentales visent particulièrement les biens à double usage, c’est-à-dire les produits pouvant servir à des fins civiles et militaires. Cela inclut des composants essentiels tels que les moteurs, les batteries lithium-ion, les outils de précision et les produits chimiques nécessaires à la fabrication de missiles. L’objectif est d’entraver la capacité de la Russie à produire des armements sophistiqués.
Cependant, la Russie a développé des stratégies pour contourner ces restrictions. Elle s’appuie sur des pays tiers, comme la Chine, l’Inde, la Turquie et le Vietnam, pour acquérir indirectement ces composants. Par exemple, des entreprises indiennes telles que Sharpline Automation et Shaurya Aeronautics ont été identifiées pour avoir exporté vers la Russie des machines-outils et des technologies sensibles . De plus, des sociétés comme Dalkos Co Ltd orchestrent des schémas transnationaux pour acheminer des équipements interdits via des pays intermédiaires.
Ces pratiques augmentent les coûts et les délais d’approvisionnement pour la Russie, mais permettent de maintenir une production militaire continue. Elles soulignent également les défis pour les pays occidentaux à renforcer l’efficacité des sanctions et à surveiller les flux commerciaux mondiaux.
Les stratégies d’évitement des sanctions pétrolières
Le secteur énergétique, pilier de l’économie russe, est également ciblé par les sanctions, notamment par un plafonnement des prix du pétrole imposé par le G7. Pour contourner ces mesures, la Russie a mis en place une flotte fantôme de navires opérant sous des pavillons de complaisance, tels que ceux du Liberia ou du Gabon, et utilisant des techniques comme les transferts de cargaison en mer pour masquer l’origine du pétrole.
Des pays comme la Chine et l’Inde continuent d’acheter du pétrole russe à prix réduit, représentant respectivement environ 40 % et 10 % des exportations russes en 2023. Ces transactions permettent à la Russie de maintenir ses revenus pétroliers, bien que les marges bénéficiaires soient réduites. Par ailleurs, des entreprises basées aux Émirats arabes unis jouent un rôle clé dans le commerce du pétrole russe, facilitant son exportation vers des marchés tiers .
Ces mécanismes d’évitement complexifient la tâche des autorités occidentales pour faire respecter les sanctions et nécessitent une coopération internationale renforcée pour identifier et sanctionner les entités impliquées.

Impact économique des sanctions sur la Russie et l’Ukraine
Les sanctions ont des répercussions économiques significatives pour la Russie. Selon les données de la Banque mondiale, le PIB russe est passé de 1 843 milliards de dollars en 2021 à 2 021 milliards en 2023, avec une croissance de 4,1 % en 2024 . Cependant, cette croissance est principalement tirée par le secteur militaire, tandis que les secteurs civils stagnent.
En Ukraine, l’économie a subi une contraction de près de 30 % en 2022 en raison de l’invasion, mais a montré des signes de reprise avec une croissance de 5 % en 2023 . Cette résilience est soutenue par une aide internationale substantielle, notamment des engagements de l’UE de plus de 31,5 milliards de dollars en 2022 et 2023, et des promesses de 4,2 milliards en 2025.
La comparaison des trajectoires économiques des deux pays souligne l’impact différencié des sanctions et de l’aide internationale, avec une Russie confrontée à une économie de guerre sous pression et une Ukraine bénéficiant d’un soutien extérieur pour sa reconstruction.
Pénurie de main-d’œuvre qualifiée en Russie
La guerre en Ukraine a exacerbé la pénurie de main-d’œuvre en Russie. Environ un million de travailleurs manquent à l’appel, en raison des pertes humaines, de la mobilisation militaire et de l’émigration . Cette situation affecte particulièrement les secteurs nécessitant des compétences techniques, comme l’industrie et la santé.
Pour remédier à cette pénurie, le gouvernement russe a mis en place des mesures incitatives, notamment des primes pour les étudiants en filières techniques et des obligations de service pour les diplômés en médecine, sous peine de rembourser jusqu’à trois fois le coût de leur formation . Malgré ces efforts, le manque de personnel qualifié freine la capacité de la Russie à maintenir une production industrielle soutenue.
Cette pénurie de main-d’œuvre qualifiée pose un défi majeur pour l’économie russe, limitant sa capacité à répondre aux besoins de la guerre et à maintenir sa compétitivité industrielle.
Perspectives et implications
La capacité de la Russie à contourner les sanctions internationales met en évidence les limites de ces mesures lorsqu’elles ne sont pas accompagnées d’une surveillance et d’une coopération internationales renforcées. Les réseaux d’approvisionnement parallèles, les pays tiers et les stratégies d’évitement sophistiquées permettent à Moscou de maintenir son effort de guerre, malgré des coûts économiques croissants.
Cependant, cette résilience apparente masque des vulnérabilités structurelles, notamment une dépendance accrue à certains partenaires, une économie de guerre sous tension et une pénurie de main-d’œuvre qualifiée. À long terme, ces facteurs pourraient limiter la capacité de la Russie à soutenir un conflit prolongé et à maintenir sa position sur la scène internationale.
Avion-Chasse.fr est un site d’information indépendant.