Beijing présente un drone furtif supersonique sans dérive

Beijing présente un drone furtif supersonique sans dérive

Grand drone furtif sans dérive, proche d’un J-10, vu à Pékin : intakes DSI, EOTS, soute interne, vitesse supersonique, mission UCAV et collaboration.

La parade du 3 septembre à Pékin a montré un drone furtif de grande taille, sans empennage, comparable à un J-10 par ses dimensions. Sa voilure en delta modifié, ses entrées d’air DSI, sa buse dentelée et un capteur EOTS sous le nez indiquent des performances supersoniques, une soute interne et une mission de supériorité aérienne non habitée. Un Type A plus compact a également défilé. L’ensemble renvoie à une stratégie chinoise combinant UCAV haute performance et collaboration homme-machine avec des chasseurs comme J-20/J-20S. Le statut exact (maquette avancée ou cellule apte au vol) reste à confirmer, mais la cohérence des détails structurels, l’imagerie préalable et les marquages suggèrent un programme sérieux, avec un message clair : montée en puissance des drones de combat capables d’emporter des missiles en interne et d’opérer en réseau.

Beijing présente un drone furtif supersonique sans dérive

Le contexte du défilé et la montée en puissance des UCAV chinois

Le défilé du 3 septembre à Pékin, pour le 80e anniversaire de la victoire sur le Japon, a servi de vitrine aux systèmes sans équipage et à la doctrine chinoise axée sur la masse combattante et la survivabilité. Au-delà des vecteurs balistiques, plusieurs drones de combat ont été montrés sur camions porte-engins, sans bâches, révélant des géométries détaillées. Parmi eux, un drone furtif de grande taille, désigné par des observateurs comme Type B ou UASF (Unmanned Air Superiority Fighter), se distingue par son gabarit « chasseur », proche d’un J-10 (longueur ~16,9 m, envergure ~9,8 m). Le Type A, plus fin, adopte aussi une configuration sans dérive, mais avec un plan en lambda et des entrées d’air de style caret, sans bulle EOTS proéminente.
Ce duo Type A/Type B cadre avec une trajectoire déjà visible : la Chine a multiplié les itérations de UCAV (par exemple GJ-11 Sharp Sword, aile volante) et travaille sur la compatibilité navale, l’emport interne de munitions et l’attaque électronique. Le signal stratégique du défilé est double. D’abord, la PLAAF met en avant une palette complète allant du wingman collaboratif à l’UCAV autonome, avec des rôles air-air et air-sol. Ensuite, l’industrie aéronautique affiche une capacité d’intégration rapide, des capteurs aux propulseurs, avec une communication offensive sur la souveraineté technologique.
Conséquence opérationnelle : à court terme, même des cellules en pré-série servent à entraîner les chaînes de développement et de test (capteurs, liaisons de données, gestion thermique, RCS). À moyen terme, l’objectif vise des essaims et des paquets composites combinant J-20/J-35, CCA et UCAV pour saturer la défense adverse, étirer ses radars, et imposer un tempo aérien plus élevé que celui des forces occidentales.

Le design du Type B : un profil furtif et supersonique orienté air-air

Le Type B adopte une cellule sans dérive, avec une aile delta modifié en losange aux extrémités tronquées et de grands gouvernes sur bord de fuite. Le fuselage montre un chine marqué qui raccorde des entrées d’air DSI latérales. Ce choix limite la complexité des séparateurs de couche limite, réduit les pièces critiques et, surtout, indique un objectif supersonique. La DSI génère une onde de choc stationnaire utile au contrôle du débit à Mach élevé et permet de supprimer les rampes mobiles, gagnant en masse et fiabilité.
La présence d’une buse à géométrie variable (probable post-combustion) avec denture sur la veine et le carénage évoque un traitement partiel du RCS arrière. Ce compromis — performances vs discrétion arrière — est courant : le F-35 conserve une section circulaire optimisée thermiquement et mécaniquement, au prix d’un arrière un peu plus observable. Des itérations futures du Type B pourraient intégrer une buse 2D avec poussée vectorielle, améliorant la signature et la maniabilité à haute incidence.
Sous le nez, un EOTS de grande taille suggère des fonctions IRST, télémétrie laser et imagerie multi-spectrale. Couplé à des liaisons de données sécurisées, l’EOTS sert à détecter et trier des cibles à longue portée, notamment en environnement de brouillage où le radar AESA d’un chasseur partenaire peut être éteint. Les trappes visibles sous la cellule et le volume disponible laissent penser à une soute interne dimensionnée pour des missiles air-air de moyenne/longue portée et, selon configuration, des munitions air-sol.
Sur le plan énergétique, un monoréacteur moderne peut fournir une poussée de l’ordre de 80 à 120 kN en post-combustion (valeurs indicatives selon famille moteur). À Mach 1 au niveau de la mer, la vitesse est d’environ 1 225 km/h (plus faible qu’en altitude). Dans une mission d’interception, un UCAV sans pilote ni sièges éjectables allège la masse de plusieurs centaines de kilogrammes, libérant du carburant ou de la charge utile dans un volume comparable à un J-10.

La mission visée : une supériorité aérienne non habitée, distincte des CCA

La supériorité aérienne non habitée diffère d’un CCA optimisé pour le coût. Un UCAV comme le Type B mise sur la vitesse, la pénétration et la résistance aux capteurs adverses pour intercepter, fixer ou détourner des chasseurs ennemis, voire imposer des fenêtres de tir favorables aux plateformes amies. Le coût unitaire sera plus élevé qu’un drone loyal wingman basique, car la cellule, les revêtements RAM, la motorisation et l’avionique doivent tenir les mêmes enveloppes qu’un chasseur léger. Mais l’absence de pilote réduit le coût de formation et épargne un capital humain rare.
Comparaison utile : le Bayraktar Kizilelma turc, canard-delta et monomoteur, vise une cellule supersonique (versions ultérieures), avec un accent mis sur le rapport poussée/masse et la charge utile plutôt que sur une furtivité poussée. À l’inverse, le Type B privilégie la discrétion frontale et la soute interne, au prix probable d’une complexité et d’un coût supérieurs. Sur un théâtre indo-pacifique, un UCAV furtif supersonique peut ouvrir des couloirs à des missiles air-air longue portée, couper des lignes logistiques aériennes et contraindre l’adversaire à allumer ses radars, augmentant son exposition aux armes anti-rayonnement.
Conséquences : si la PLAAF parvient à industrialiser le Type B même en petits lots, elle obtiendra une capacité d’usure sophistiquée. Un lot initial de quelques dizaines d’unités capables d’opérer en paire ou en trio avec J-20/J-35 suffirait à dilater le volume de combat, rendre plus coûteuse la défense aérienne adverse et accroître l’attrition psychologique côté pilote ennemi, qui se sait ciblé par des vecteurs sans équipage prêts à des échanges cinétiques à haut risque.

Les modes d’emploi : collaboration avec J-20/J-20S, capteurs et autonomie

Le J-20S biplace a souvent été cité comme chef de mission potentiel pour des drones de combat, l’équipier arrière gérant les liaisons, la fusion de données, la désignation et la déconfliction. Dans ce schéma, un Type B en avant, discret, détecte par IRST/EOTS, transmet des pistes et reçoit des autorisations de tir ou des zones d’interdiction. En présence de brouillage, la diversité capteur (EO/IR + radar + ESM) améliore la résilience de l’ensemble.
Le pas suivant est l’autonomie, avec un pilote automatique tactique contraint par des règles d’engagement : respect de géofencing, de couloirs, de seuils d’identification et de paramètres de tir. La Chine accepte manifestement un degré d’autonomie létale plus élevé que les États-Unis dans le domaine public, ce qui accélère les essais. Mais cela ajoute des risques : compréhension imparfaite d’une situation multi-capteurs, fratricide si l’IFF est trompé, et escalade non voulue. Techniquement, des algorithmes de fusion multi-hypothèses, des classifieurs entraînés sur de larges bases et des simulateurs de combat air-air massifs sont indispensables pour atteindre des taux de décision fiables.
Côté armements, une soute pouvant accueillir des missiles air-air de 3,2 à 4,0 m poserait des contraintes sur le gabarit des charges et la cinématique d’éjection. Un rail interne ou un lanceur rotatif impose des choix sur la compatibilité des autodirecteurs et la gestion thermique. L’autonomie implique aussi une gestion carburant et thermique prudente : à Mach élevé, le flux sur la peau chauffe, ce qui complique la signature infrarouge. Un coating RAM et des bords d’attaque soignés limitent la détection bande X/S, mais les radars VHF/UHF restent un défi, d’où l’intérêt d’approches multiaxes et de routes basses quand la mission l’exige.

Beijing présente un drone furtif supersonique sans dérive

Les implications industrielles et stratégiques : maturité réelle ou théâtre ?

Les numéros visibles, la qualité d’assemblage, les panneaux d’accès et les détails près du train font penser à des cellules réalistes. Mais une parade sert aussi d’outil politique et industriel. Il est possible que Type A et Type B soient des démonstrateurs concurrents issus d’équipes différentes, avec sélection ultérieure après essais en vol. C’est un processus classique pour réduire les risques techniques par concurrence interne.
Le contraste avec les États-Unis est net dans l’espace public : Washington investit surtout sur des CCA moins coûteux et consent à peu de communication sur un UCAV de supériorité. En langage clair : la Chine avance vite dans le segment UCAV furtif, tandis que les programmes américains visibles ont abandonné ce créneau depuis les démonstrateurs X-45/X-47. Résultat, même si la PLAAF n’industrialise pas immédiatement, elle accumule du retour d’expérience à un rythme soutenu, quand l’USAF mise d’abord sur l’accompagnement de chasseurs habités par des drones plus simples.
Sur le plan industriel, la bascule vers des moteurs nationaux, des capteurs et des liaisons chiffrées internes, réduit la vulnérabilité aux chaînes d’approvisionnement extérieures. Sur le plan budgétaire, un UCAV furtif haute performance restera onéreux : revêtements, qualité des composites, tolérances serrées, bancs d’essais pour signature et vibrations. Mais le coût global de propriété peut rester compétitif si l’on évite l’entraînement pilote, si l’on économise des heures de cellule de chasseur et si l’on accepte une attrition matérielle plus élevée en campagne. Voilà la réflexion franche qui transparaît : la Chine n’essaie pas d’être « raisonnable », elle cherche l’effet militaire utile, quitte à rogner l’élasticité financière à court terme.

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