
Un gigantesque drone furtif, désigné WZ-X, aperçu en vol en Chine. Ses dimensions comparables au B-2 américain soulèvent des enjeux stratégiques.
Une image récente montre un drone furtif volant-aile chinois d’une taille exceptionnelle, probablement le WZ-X, déjà observé par satellite à la base de Malan dans le Xinjiang en mai 2025. Son envergure estimée à 52 mètres est proche de celle du bombardier furtif B-2 Spirit. Ce type d’appareil appartient à la catégorie HALE (High-Altitude Long-Endurance) et sert principalement aux missions de renseignement stratégique. L’apparition publique de ce cliché, quelques semaines avant le défilé militaire du 3 septembre à Pékin, confirme l’accélération des programmes aériens chinois et soulève des inquiétudes sur l’équilibre militaire indo-pacifique.
La description technique du drone en vol
L’image diffusée présente un appareil massif en configuration volant-aile. On distingue nettement le train d’atterrissage sorti ainsi que des surfaces de contrôle aérodynamiques de type split rudders sur les extrémités d’ailes, un dispositif déjà utilisé sur le B-2 américain. La structure associe aile et fuselage dans un ensemble unique, avec une section centrale large et aplatie. Aucun cockpit n’est identifiable, ce qui laisse penser qu’il s’agit bien d’un drone, mais la présence d’un poste de pilotage n’est pas totalement exclue.
L’envergure de l’appareil est estimée à 170 pieds, soit 52 mètres, un chiffre qui le place dans la même catégorie que le B-2 Spirit (52,4 m). La taille du train d’atterrissage comparée à l’ensemble confirme l’échelle monumentale de l’engin. À l’arrière, on devine des sorties d’échappement rectangulaires, suggérant un système à deux réacteurs.
Ces caractéristiques laissent penser que ce drone appartient à la catégorie HALE, conçue pour voler à haute altitude durant plusieurs dizaines d’heures. La voilure très allongée privilégie la portance et l’endurance, un atout essentiel pour des missions de surveillance couvrant de vastes zones comme la mer de Chine méridionale ou l’océan Pacifique.
La comparaison avec les autres drones chinois
La Chine développe depuis plusieurs années une large gamme de drones. Le plus connu des projets furtifs est le CH-7, un drone également en configuration volant-aile, mais dont l’envergure reste bien inférieure à celle du WZ-X. Le CH-7 possède une section centrale plus épaisse et courbée, tandis que le WZ-X semble plus plat et étiré.
Le WZ-7 Soaring Dragon, lui, adopte une configuration « joined wing » et atteint environ 25 mètres d’envergure, soit moitié moins que le WZ-X. Il assure déjà des missions de renseignement dans le cadre de la surveillance des mers bordant la Chine. Le WZ-9 Divine Eagle, caractérisé par sa double cellule reliée par une aile centrale, est quant à lui destiné à détecter des cibles aériennes, en particulier les avions furtifs adverses. Ses 35 heures d’autonomie en font un outil puissant, mais ses dimensions restent loin derrière celles du drone observé en mai 2025.
Ces comparaisons mettent en évidence un fait clair : aucun appareil chinois connu ne rivalise en taille avec le WZ-X. Celui-ci représente donc un saut qualitatif dans la catégorie des drones furtifs chinois. Sa taille, proche d’un bombardier stratégique, laisse supposer une capacité d’emport interne importante pour des capteurs, radars et antennes de communication longue portée.

Les enjeux stratégiques d’une plateforme HALE furtive
Un drone de type HALE furtif comme le WZ-X peut transformer les capacités de la Chine en matière de renseignement stratégique. Son autonomie, estimée à 30 à 40 heures de vol, et son rayon d’action supérieur à 5 000 km, lui permettent de couvrir une zone allant jusqu’à Guam, où se trouvent des bases américaines essentielles.
Pour Pékin, ce type de drone offre plusieurs avantages. Il complète le réseau spatial chinois en fournissant des données en temps réel, sans dépendre uniquement des satellites, vulnérables aux armes antisatellites. Grâce à sa furtivité, il peut pénétrer plus profondément dans l’espace aérien adverse qu’un drone conventionnel, collectant des informations sur les mouvements de flottes ou de troupes.
L’armée américaine craint que ces appareils soient utilisés pour guider des systèmes de frappe à longue portée, comme les missiles balistiques antinavires DF-21D ou DF-26, capables de viser un porte-avions à plus de 2 000 km. Avec une observation constante fournie par un drone HALE furtif, le temps de réaction des forces américaines se réduirait considérablement.
En d’autres termes, le WZ-X n’est pas seulement un outil de renseignement : il constitue un multiplicateur de puissance pour les armes de longue portée chinoises.
Les comparaisons internationales
Le développement du WZ-X rappelle d’autres programmes étrangers. Aux États-Unis, le RQ-180, développé par Northrop Grumman, reste largement classifié. Son envergure, estimée entre 40 et 45 m, est inférieure à celle du drone chinois, mais sa mission est similaire : assurer des opérations de surveillance discrètes dans les zones les plus défendues. Le budget américain dédié aux drones stratégiques dépasse régulièrement 1 milliard USD par an depuis 2018.
La Russie mise sur le S-70 Okhotnik-B, un drone furtif plus petit, avec environ 20 m d’envergure et 20 tonnes de masse. Conçu pour travailler en coopération avec le Su-57, il se rapproche davantage d’un drone d’attaque que d’une plateforme HALE.
La singularité chinoise est d’avoir conçu un drone aussi grand qu’un bombardier, entièrement dédié à la reconnaissance. Cela confirme la priorité accordée par Pékin au renseignement aérien longue durée, dans une logique de rivalité avec Washington.
Les conséquences régionales en Indo-Pacifique
L’introduction d’un drone comme le WZ-X modifie les équilibres militaires en Asie. Son rayon d’action couvre non seulement la mer de Chine méridionale mais aussi le Pacifique occidental. Cela met directement sous surveillance les déploiements américains à Guam, ainsi que les espaces aériens du Japon et du nord de l’Australie.
Le Japon, déjà engagé dans un programme de modernisation militaire de plus de 40 milliards d’euros sur cinq ans, investit massivement dans la défense antimissile pour contrer ces menaces. L’Australie, avec l’accord AUKUS, s’oriente vers des sous-marins nucléaires et des systèmes de détection avancés pour rééquilibrer la situation.
Ces drones augmentent la pression psychologique et opérationnelle. Les forces américaines doivent désormais intégrer l’hypothèse d’une surveillance constante, ce qui réduit leur liberté de manœuvre et accroît leurs coûts d’opérations. Le WZ-X agit ainsi comme un outil de dissuasion indirect, même avant d’entrer en service actif.
Les perspectives industrielles et technologiques
Construire un drone furtif de plus de 50 m d’envergure exige une capacité industrielle proche de celle nécessaire pour produire des avions de ligne. La Chine peut s’appuyer sur AVIC et d’autres grands conglomérats aéronautiques. Le recours à des matériaux absorbants et à des revêtements spéciaux reste coûteux : aux États-Unis, l’entretien d’un seul B-2 coûte environ 10 millions USD par an rien que pour le maintien de la furtivité. Pékin doit donc avoir mis au point des procédés industriels permettant de réduire les coûts de maintenance pour envisager une production en série.
Le marché mondial des drones militaires est évalué à 30 milliards USD en 2025, dont près de 40 % pour les systèmes de surveillance et de renseignement. La Chine ne vise pas seulement un usage national : certains analystes estiment qu’à moyen terme, elle pourrait proposer des versions export de ses drones HALE, notamment au Pakistan ou à l’Iran.
Si cela se confirme, Pékin deviendrait le seul pays après les États-Unis à disposer d’une flotte de drones furtifs de cette taille, renforçant son statut d’acteur majeur dans l’industrie aéronautique militaire.
Les scénarios possibles pour l’avenir
Trois scénarios se dessinent pour le WZ-X.
- Un démonstrateur unique : destiné à valider les choix technologiques. Dans ce cas, la menace opérationnelle resterait limitée mais montrerait l’ambition chinoise.
- Une flotte restreinte : une dizaine d’exemplaires utilisés pour la reconnaissance stratégique. Ce scénario renforcerait l’indépendance de Pékin en matière de renseignement.
- Une production en série : plusieurs dizaines d’unités intégrées à un réseau C4ISR. Dans ce cas, l’équilibre militaire régional serait profondément modifié.
Dans chaque hypothèse, la Chine démontre qu’elle avance vite. Même sans certitude sur le nombre exact d’appareils construits, la simple diffusion de ces images constitue déjà un signal stratégique destiné à ses rivaux.
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