
La FAA veut renouveler son système de contrôle aérien d’ici 2028 et sollicite l’industrie sur les télécoms, l’automatisation et la surveillance.
La Federal Aviation Administration (FAA) souhaite moderniser l’ensemble de son système national de contrôle du trafic aérien d’ici fin 2028. Elle a lancé en juin 2025 un appel à solutions technologiques auprès de l’industrie, avec un calendrier resserré. Ce projet vise une refonte complète des infrastructures de communication radio, de surveillance radar, de systèmes de télécommunication, et une automatisation accrue des tâches dans les cockpits et les tours de contrôle. Trois modèles de partenariat industriel sont à l’étude pour mener à bien ce chantier complexe. La FAA cherche également à réduire les coûts, sécuriser les chaînes logistiques et maîtriser les droits d’usage sur les technologies critiques. L’objectif est de passer d’un système obsolète basé sur des architectures des années 1970 à une gestion fluide, numérique et résiliente du trafic aérien. Le chantier est estimé à plusieurs milliards d’euros et devrait transformer durablement la gestion de l’espace aérien américain.
Une volonté politique de moderniser un système vieillissant
La modernisation du National Airspace System (NAS) américain fait l’objet d’une accélération nette depuis l’annonce, par les autorités fédérales, de la volonté présidentielle de disposer d’un nouveau système opérationnel d’ici fin 2028. L’initiative s’inscrit dans une démarche de réforme industrielle du secteur aéronautique, engagée sous la précédente administration, mais relancée avec plus d’urgence depuis 2024.
Le système de contrôle aérien actuellement en place aux États-Unis repose encore sur des infrastructures et des procédures héritées des années 1970. Il comprend plus de 300 tours de contrôle, 20 centres de contrôle en route (ARTCC) et 120 installations radar primaires et secondaires. Malgré plusieurs évolutions ponctuelles, comme l’intégration partielle du système NextGen, le cœur du réseau reste limité par une architecture centralisée et rigide, qui ne répond plus aux exigences actuelles de fluidité du trafic, de sécurité numérique et d’interopérabilité.
La FAA a donc lancé un appel à contributions industrielles à travers le numéro de référence 693KA7BNATCS, dans le cadre du projet Brand New Air Traffic Control System. Le calendrier est extrêmement contraint : les propositions doivent être déposées au plus tard le 25 juillet 2025, soit moins de 30 jours après l’ouverture formelle de l’appel d’offres. Cette contrainte s’explique par la disponibilité imminente d’un financement fédéral, qui conditionne la viabilité du projet à un démarrage rapide.

Des domaines technologiques critiques pour une refonte complète
La FAA identifie plusieurs domaines technologiques prioritaires dans son appel à solutions. Les industriels sont invités à proposer des avancées concrètes en matière de télécommunications aéronautiques, de communications radio VHF/UHF, de surveillance radar ou satellitaire, d’automatisation des fonctions de contrôle et d’infrastructures d’hébergement et de déploiement des nouveaux systèmes.
Le besoin concerne autant les centres de contrôle aériens que les cockpits eux-mêmes. L’objectif est de favoriser l’automatisation des procédures, y compris dans les contextes de vol à un ou deux pilotes, à travers des systèmes de gestion intelligente des données de vol, de priorisation des alertes, et de communication directe machine à machine entre l’aéronef et les contrôleurs. À titre d’exemple, le German Aerospace Center (DLR) teste déjà de tels systèmes dans des configurations de cockpit réduit.
En parallèle, la FAA souhaite intégrer les capacités modernes de surveillance par ADS-B, de liaison de données CPDLC et d’exploitation des radars passifs, afin d’alléger la dépendance aux radars actifs classiques. La résilience cyber est un critère impératif dans le choix des systèmes, de même que la capacité à s’intégrer dans des architectures cloud hybrides et à interagir avec des flottes civiles, militaires et autonomes (UAV, eVTOL).
Trois modèles industriels à l’étude pour la mise en œuvre
Pour organiser ce chantier complexe, la FAA envisage trois modèles de gouvernance industrielle :
- Le modèle de prime intégrateur, dans lequel un seul maître d’œuvre est responsable de tous les nouveaux contrats, tout en résiliant les anciens. Ce modèle offre une cohérence technique, mais implique des risques élevés de rupture en cas d’échec du fournisseur.
- Le modèle non-prime, dans lequel la FAA conserve tous les contrats existants, mais confie la gestion globale du programme à un intégrateur indépendant. Ce modèle permet une plus grande stabilité contractuelle, mais exige une coordination forte.
- Le modèle hybride, qui combine les deux approches : l’intégrateur gère les nouveaux contrats et reprend, selon les cas, certains contrats existants, tandis que la FAA conserve la maîtrise des autres.
Dans tous les cas, l’intégrateur ne pourra pas soumissionner directement aux marchés technologiques afin d’éviter les conflits d’intérêts. Cette séparation vise à garantir une gouvernance impartiale, mais limite aussi les marges de manœuvre opérationnelles.
Le modèle retenu influencera directement la vitesse de mise en œuvre, les coûts de transition, et l’architecture contractuelle des dix prochaines années.
Des attentes fortes en matière de coûts, sécurité et logistique
En plus de la refonte technologique, la FAA souhaite que les industriels proposent des stratégies concrètes de réduction des coûts et de gestion des risques logistiques. Le défi porte autant sur le matériel que sur les ressources humaines. Actuellement, le NAS emploie plus de 14 000 contrôleurs aériens et repose sur des milliers de techniciens de maintenance, dont une part importante atteindra l’âge de la retraite d’ici 2030.
Les industriels devront démontrer leur capacité à produire des équipements fiables à grande échelle, tout en assurant la continuité opérationnelle pendant les phases de transition. Le facteur de résilience face aux cyberattaques est également central, dans un contexte où la menace numérique contre les infrastructures critiques s’est fortement intensifiée.
Autre point sensible : la gestion des droits sur les données et les logiciels. La FAA souhaite éviter toute dépendance future à des technologies dont les droits d’usage seraient restreints, et exige donc une transparence totale sur la propriété intellectuelle. Cette exigence complique la tâche des industriels, notamment pour les technologies duales (civiles/militaires) ou dérivées de composants non souverains.
Enfin, la FAA souhaite explorer des solutions commerciales déjà éprouvées, y compris dans l’aviation privée ou dans les systèmes de gestion de flottes de drones. Cette approche vise à accélérer le calendrier, réduire les délais de certification et s’appuyer sur des briques technologiques déjà disponibles.
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