
HAL bondit après la commande de 97 Tejas Mk1A (7,0 milliards €). Cadences, livraisons 2027-2033, impacts financiers et avis d’analystes.
En résumé
Le Ministry of Defence indien a signé un contrat ferme pour 97 appareils LCA Tejas Mk1A auprès de HAL, d’un montant de 62 370 crore ₹ (environ 7,0 milliards €). Le lot comprend 68 monoplaces et 29 biplaces, avec un démarrage des livraisons en 2027-2028 et un achèvement sous six ans. L’industriel s’appuie sur trois lignes (deux à Bengaluru et une à Nashik) pour porter la production à 24/an, un rythme compatible avec le calendrier. Les contraintes d’approvisionnement en moteurs GE F404, sources de retards en 2024-2025, se détendent progressivement. Le carnet de commandes (order book) de HAL dépasse 2,7 lakh crore ₹, ce qui soutient la visibilité des flux de trésorerie et attire des analystes positifs (recommandations à l’achat, objectifs entre 5 800 et 6 220 ₹ par action). Pour l’Indian Air Force, 97 Tejas supplémentaires portent à 180 le total Mk1A, soit l’équivalent d’environ dix escadrons, réduisant la dépendance aux importations et renforçant la trajectoire Atmanirbhar Bharat.
Le contrat LCA Mk1A et ses paramètres industriels
L’accord signé à New Delhi fixe un cadre clair : 68 monoplaces de combat et 29 biplaces d’entraînement/transition, catégorie Buy (India-IDDM). La valeur de 62 370 crore ₹ correspond à environ 7,0 milliards €, soit un coût moyen proche de 6,4 milliards ₹ par cellule, incluant lots de soutien, outillages et pièces. La planification prévoit un premier avion livré sur l’exercice 2027-2028, puis un flux régulier sur six années. Ce phasage reflète la montée en maturité de la chaîne Tejas Mk1A et l’intégration des sous-ensembles chez les partenaires (structures, harnais, éléments composites).
Ce contrat suit le premier lot de 83 Mk1A notifié en 2021. L’ensemble (83 + 97) porte l’objectif opérationnel à 180 appareils, volume cohérent avec le format visé par l’Indian Air Force pour remplacer progressivement MiG-21 et combler des creux capacitaires. Le Mk1A se distingue par un radar AESA indigène, une suite de guerre électronique modernisée, un viseur de casque et des liaisons de données sécurisées. Motorisé par le GE F404-IN20, il reste simple à maintenir, avec une masse à vide autour de 6,6 t, une masse maximale au décollage proche de 13,5 t et un rayon d’action qui répond aux profils d’interception, d’appui et de défense aérienne nationale.
La logique politique est assumée : sécuriser une flotte nationale à coûts maîtrisés, lisser les courbes d’apprentissage, et basculer rapidement vers des cadences stables. La structure contractuelle sous six ans donne de la visibilité aux fournisseurs, condition sine qua non pour tenir prix et délais.
La production et la chaîne d’approvisionnement : cadence, contraintes et solutions
La production à 24/an repose sur deux lignes à Bengaluru (16 unités/an) et une ligne à Nashik (8 unités/an). Les investissements en outillages (≈150 crore ₹ à Nashik), l’industrialisation des tronçons (fuselages arrière et centraux livrés par des partenaires indiens) et l’augmentation des contrôles qualité automatisés doivent réduire les cycles. HAL a officialisé la stabilisation des gammes Mk1A avec des premiers avions « flight-line » dès 2025, conditionnés par la livraison des propulseurs.
Le point dur a été le débit moteurs. Après un décalage des premières livraisons GE en 2024, la cadence promise s’établit autour de 12 moteurs la première année, puis 20/an. Ce palier soutient un rythme d’avions livrables de 16 à 24/an, selon la priorisation des kits et la disponibilité d’équipements (AESA, EW, sièges, calculateurs). HAL a parallèlement accru l’intégration locale des sous-ensembles (pylônes, réservoirs pendulaires, harnais) pour réduire l’exposition aux retards import.
Sur le plan financier, l’order book dépasse 2,7 lakh crore ₹ et représente plus de huit fois le chiffre d’affaires annuel, un ratio typique d’une montée en série multi-programmes (Tejas, ALH Dhruv, LCH Prachand, LUH). New Delhi examine une réorganisation ciblée de HAL afin d’accélérer les flux (simplification de la gouvernance, consolidation d’unités, renforcement du contrôle de projet). L’objectif est pragmatique : supprimer goulots d’étranglement (peintures, essais, réception qualité), fiabiliser les jalons d’acceptation et raccourcir le cycle commande-livraison.
Côté supply chain, la standardisation des références et la « cannibalisation administrative » (replanification inter-lignes) restent des options d’arbitrage en cas de tension sur une pièce critique. L’enjeu est d’éviter les avions « presque finis » qui immobilisent du fonds de roulement. La clef restera la régularité des moteurs GE et la robustesse des fournisseurs avioniques.

La dynamique de marché et l’impact capacitaire pour l’IAF
Le flux d’annonces a produit un effet immédiat sur le titre HAL. Sur un mois, le cours a progressé à deux chiffres ; depuis janvier, l’action gagne autour de 14-15 %. Plusieurs maisons relèvent leurs objectifs : Nomura maintient l’achat avec 6 100 ₹ ; des courtiers locaux visent 5 800 à 6 220 ₹, pariant sur l’effet volume et la discipline coûts. Ces analystes positifs s’appuient sur trois leviers : visibilité de revenus sur 7-8 ans, amélioration des marges avec la montée en cadence, et probabilité élevée d’affaires additionnelles (hélicoptères, moteurs, MRO).
Pour l’Indian Air Force, 180 Mk1A équivalent à environ dix escadrons (format typique 16-18 avions plus réserves). Le calendrier 2027-2033 permet de planifier la transition des unités et d’absorber la formation équipages-techniciens sans « trou » opérationnel. Les premiers lots serviront de socle à la qualification armements (Astra Mk1/2, bombes guidées), à l’intégration des liaisons réseau et à la montée de la maintenance condition-based.
À moyen terme, l’alignement Tejas Mk1A, puis LCA Mk2 et AMCA, dessine une filière complète. L’effet d’apprentissage sur le Mk1A irrigue le Mk2 (motorisation GE F414) et les procédés composites de prochaine génération. La politique Atmanirbhar Bharat gagne en crédibilité lorsque les jalons de livraison sont tenus et que les coûts restent contenus. Dire l’inverse serait naïf : si les moteurs ou l’AESA subissent des retards, le rythme retombe. Mais avec trois lignes, des stocks mieux dimensionnés et une supervision étatique plus serrée, le risque opérationnel se réduit.
À l’export, l’équation reste ouverte. Un Tejas livré en nombre et à l’heure crédibilise les offres vers l’Asie et l’Afrique. Sans cela, les prospects resteront prudents. Le contrat des 97 appareils est donc plus qu’un volume : c’est une preuve par la série. Dans un contexte de sous-dotation de l’IAF (≈31 escadrons vs objectif 42), chaque livraison compte. Réussir ce lot à coût cible et au rythme annoncé installerait durablement HAL comme maître d’œuvre compétitif face aux constructeurs établis.
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