La Corée du Sud prévoit une base lunaire fonctionnelle d’ici 2045

La Corée du Sud prévoit une base lunaire fonctionnelle d’ici 2045

La Corée du Sud présente une feuille de route spatiale ambitieuse avec un objectif : construire une base sur la Lune et atteindre Mars d’ici 2045.

La Corée du Sud a officialisé une stratégie spatiale de long terme qui place la Lune au cœur de ses ambitions. Le 17 juillet 2025, lors d’une audition publique à Daejeon, l’Agence spatiale coréenne (KASA) a présenté un programme structuré autour de cinq axes prioritaires, incluant l’orbite basse terrestre, les missions en microgravité, l’exploration lunaire et l’étude du Soleil. L’objectif est de développer une base lunaire opérationnelle à horizon 2045, après une série d’étapes intermédiaires : un atterrisseur robotisé d’ici 2032, suivi d’un modèle évolué pour 2040. L’agence mise sur le développement de technologies propres de descente, de mobilité, et d’exploitation des ressources in situ, notamment la glace d’eau. Ce plan s’inscrit dans une course mondiale à l’installation sur la Lune, où la Corée du Sud rejoint les États-Unis, la Chine, la Russie et l’Inde.

Une feuille de route ambitieuse pour établir une présence durable sur la Lune

La stratégie dévoilée par la Korea AeroSpace Administration (KASA) constitue un tournant majeur pour la Corée du Sud, qui veut passer du statut de puissance émergente à celui d’acteur spatial autonome. Le projet de base lunaire d’ici 2045 est structuré en étapes clairement définies, à la fois techniques, scientifiques et industrielles.

Le plan prévoit :

  • Le développement d’un atterrisseur lunaire d’ici 2032, entièrement conçu en Corée,
  • Une version plus performante d’ici 2040, capable de missions prolongées,
  • La mise en place d’un système de soutien à la vie, pour accueillir du matériel, voire des équipages à plus long terme,
  • L’exploitation des ressources lunaires, notamment la glace d’eau, comme levier de support logistique et énergétique.

L’extraction de la glace d’eau est un point stratégique : une fois dissociée, elle fournit de l’oxygène pour la respiration et de l’hydrogène pour les ergols, rendant possible une économie circulaire sur place. La Lune devient ainsi un point de relais logistique pour des missions lointaines, comme Mars.

Le programme spatial sud-coréen se distingue par un calendrier progressif, appuyé sur des jalons réalistes, dont certains sont déjà amorcés. En 2022, le satellite Danuri (KPLO) a été mis en orbite lunaire avec succès. Ce satellite continue de collecter des données utiles à la cartographie et à la caractérisation des sites d’atterrissage.

Avec cette feuille de route, la Corée du Sud entend s’affranchir des dépendances extérieures, en créant ses propres moyens de propulsion, de navigation autonome et d’exploitation robotique. Cette autonomie est un enjeu de souveraineté technologique, mais aussi de positionnement stratégique dans les futurs partenariats lunaires.

La Corée du Sud prévoit une base lunaire fonctionnelle d’ici 2045

Une agence spatiale jeune mais portée par un écosystème en plein essor

Créée en 2023, l’Agence spatiale coréenne (KASA) hérite des compétences déjà présentes dans des institutions comme le Korea Aerospace Research Institute (KARI) et le Korea Institute of Geoscience and Mineral Resources (KIGAM). Cette nouvelle structure centralise les programmes d’exploration, tout en renforçant la coordination entre la recherche et l’industrie.

Le KIGAM, par exemple, a récemment mené des tests de véhicules lunaires prototypes dans une mine désaffectée, simulant les conditions de faible luminosité et de terrain difficile. Ce type d’expérimentation préfigure les opérations de minage lunaire et d’exploration robotique. Le transfert de technologies est progressif, basé sur des environnements terrestres contraints pour affiner les capteurs, l’autonomie des robots et les interfaces logicielles.

Sur le plan industriel, des entreprises sud-coréennes comme Hanwha Aerospace, KAI (Korea Aerospace Industries), ou Doosan Robotics montent en puissance pour fournir des sous-systèmes critiques : propulsion cryogénique, mécatronique, modules de survie.

Le gouvernement a alloué un budget spatial de près de 650 millions d’euros pour 2025, avec une croissance projetée annuelle de 10 %. Cette dynamique place la Corée dans le trio de tête asiatique, derrière la Chine et le Japon, mais avec un fort accent sur l’autonomie technologique et la capacité à exporter des solutions spatiales.

La KASA envisage aussi de créer un port spatial national d’ici 2030, probablement sur l’île de Jeju, afin de lancer des missions sans dépendre de SpaceX ou d’autres vecteurs étrangers.

Une base lunaire comme levier économique, technologique et diplomatique

Le projet de base économique lunaire d’ici 2045 ne vise pas uniquement des objectifs scientifiques. Il s’agit aussi d’un pari industriel et diplomatique, aligné avec les stratégies globales des grandes puissances spatiales.

Cette base pourrait servir à :

  • Tester des technologies de construction en environnement extrême (impression 3D régolithe, structures gonflables, systèmes autonomes),
  • Extraire et transformer des ressources lunaires en consommables ou en produits semi-finis (eau, oxygène, aluminium),
  • Assurer une présence permanente robotisée, voire humaine, pour des opérations de maintenance et d’observation astronomique,
  • Héberger des expériences biologiques ou des laboratoires protégés des perturbations terrestres.

D’un point de vue économique, la Lune pourrait devenir un site de production énergétique, notamment par le transport d’hélium-3 ou par des stations solaires orbitales. Même si ces hypothèses restent spéculatives, elles mobilisent déjà des fonds d’investissement privés.

Sur le plan diplomatique, la Corée du Sud cherche à négocier sa place dans les consortiums spatiaux. Elle a signé les Artemis Accords avec les États-Unis, mais conserve une posture d’indépendance, notamment face aux initiatives sino-russes. Cette dualité permet de s’aligner sur les règles du droit spatial tout en développant une capacité d’action bilatérale ou régionale.

Enfin, cette ambition lunaire est aussi une vitrine technologique pour l’export. Le spatial devient un levier de soft power, au même titre que les infrastructures énergétiques ou les télécommunications. Une base sur la Lune pourrait, à terme, asseoir la position sud-coréenne comme fournisseur de composants pour missions internationales.

Un projet lunaire connecté à une ambition martienne à long terme

La feuille de route sud-coréenne ne s’arrête pas à la Lune. La KASA vise un atterrissage sur Mars à l’horizon 2045. Ce projet, encore au stade préliminaire, suppose une montée en gamme rapide des technologies : architecture orbitale, motorisation interplanétaire, bouclier thermique, etc.

Cette ambition martienne n’est pas isolée : elle s’inscrit dans une logique globale d’expansion du rayon d’action spatial national, avec plusieurs étapes intermédiaires :

  • Missions orbitales vers la Lune, puis vers les astéroïdes,
  • Développement de propulseurs à haute efficacité spécifique (plasma ou électrique),
  • Maîtrise de l’atterrissage précis sur sol extraterrestre,
  • Création d’écosystèmes fermés de survie longue durée.

Le projet martien s’appuie sur la synergie entre capteurs embarqués, robotique avancée et algorithmes d’intelligence artificielle embarquée. Il mobilise aussi une vision à 20 ans du tissu industriel : nanomatériaux, fiabilité électronique, endurance thermique.

L’exploration martienne sera aussi un test de la capacité politique à maintenir un cap technologique sur plusieurs décennies, dans un environnement géopolitique instable. La Corée du Sud devra faire face à la compétition des États-Unis, de la Chine, de l’Europe, mais aussi à celle de nouveaux entrants comme les Émirats arabes unis.

En reliant son programme lunaire à des ambitions interplanétaires, la KASA cherche à structurer une chaîne complète d’exploration, de la basse orbite à la planète rouge. Cette stratégie, bien que risquée, pourrait repositionner durablement la Corée du Sud comme un acteur incontournable de la scène spatiale mondiale.

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